Branding : changer de nom suffit-il à réinventer votre entreprise ?

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À l’heure ou SFR, ou encore la SNCF pour son service TGV, annoncent leur changement de nom prochain, on peut légitimement se poser la question de l’utilité de cette stratégie somme toute radicale dans le cadre d’une stratégie de communication.

En effet, réinventer sa marque en modifiant ce qui en est le plus emblématique, à savoir le nom, est loin d’être anodin. Alors que la marque dispose aujourd’hui d’une légitimité, peu importe finalement sa popularité, le changement de nom va entraîner un profond bouleversement chez ses clients. C’est tout un travail de storytelling et de réassurance autour de la nouvelle marque qu’il va falloir construire pour, au-delà du simple fait de maintenir le socle de clients actuels, utiliser ce nouveau nom, et donc cette nouvelle mythologie de marque, comme un tremplin de croissance.

Alors, changer de nom suffit-il à réinventer son entreprise ? Tout dépend, finalement, de la manière dont a été préparée la communication autour de ce changement de nom. À partir des deux cas de SFR et du service TGV, nous allons essayer de comprendre en quoi un changement de nom pour une marque peut avoir tant des effets positifs que néfastes.

Le cas SFR : quand ALTICE est le fruit et le commencement d’une aventure de croissance

Annoncée il y a à peine quelques jours, la création de la marque unique Altice pour l’ensemble des actifs de Patrick Drahi, a permis de faire de nouveau parler de l’opérateur mobile SFR, plutôt malmené parmi les opérateurs français.

Soyons clairs, dans mon imaginaire, SFR c’est un peu le Papy Mougeot de la téléphonie : une image vieillissante, un branding totalement en décalage avec les attentes des consommateurs, même RED, l’offre sensée rivaliser avec Free n’a pas réussi à franchement convaincre. Au point où on attendait tous, nous, communicants, un renouveau de cette marque qui avait pourtant tout pour reconquérir son public, même si le public en matière d’attentes vis-à-vis d’un opérateur, s’avère de plus en plus exigeant parce qu’il ne veut plus :

  • De forfaits usines à gaz : il a besoin d’une offre claire et transparente
  • De forfaits de données bikini : ne plus pouvoir se rendre sur Facebook via son mobile à partir du 10 du mois parce qu’on a 5 Go de données qu’on paye une fortune, c’est en 2017 inacceptable.

Bref, l’annonce de la création de la marque ALTICE donne un nouveau souffle à SFR, d’autant plus que le storytelling construit autour de ce changement de nom a été, dans sa sobriété, particulièrement bien pensé.

En effet, la création de la marque ALTICE se positionne habilement comme le moment charnière d’une aventure de croissance formidable, incarnée par Patrick Drahi. Cette aventure de croissance, construite à grands renforts d’acquisitions, trouve son sens et son aboutissement dans ALTICE, qui lui confère, a posteriori, une logique narrative. Aboutissement, certes, mais aussi renouveau, puisqu’ici, le changement de nom inaugure pour la marque, et donc pour SFR, une nouvelle aventure de croissance où tout reste à construire : de nouveaux produits, bien entendu, mais surtout un nouveau storytelling qui saura se nourrir de l’aventure précédente, dont il est l’accomplissement et la continuité, même si la rupture redistribue les codes narratifs et ouvre de nouveaux possibles qu’il sera passionnant de suivre.

Le cas TGV : InOui, un changement de nom qui a franchement fait polémique

Ça faisait bien longtemps qu’un changement de nom n’avait pas suscité un tel tollé dans l’opinion, au point de provoquer un des plus jolis bad buzz des dernières semaines sur les réseaux sociaux.

Il faut dire que le changement de TGV en InOui a été annoncé de manière particulièrement abrupte par la direction de la SNCF, et que sa justification, somme toute une des plus remplie de bullshit de toute l’histoire de la communication, n’a rien fait pour arranger les choses. Pourtant, ce changement de nom est intéressant à plus d’un titre, simplement parce qu’il permet la mise en cohérence des différentes offres de la SNCF. D’où vient l’erreur, alors ? D’une communication mal préparée, dans un premier temps, et surtout d’un ras le bol des usagers du dit TGV : cette annonce d’un service premium a plus retentit comme une volonté de ne pas traiter les problèmes actuels des usagers de la SNCF en déportant leur résolution dans une offre haut de gamme à venir… Bref, une regrettable erreur de storytelling !

Pourtant, la passion passée, nous comprenons une des fonctions premières du changement de nom : celle de lier autour d’une histoire commune des services qui ne présentaient pas a priori de lien les uns avec les autres. Avec cette constante du OUI dans chacun de ses services, la SNCF est désormais en mesure de proposer au voyageur de vivre une histoire particulière avec elle, une histoire séquencée autour de moments forts, des moments qui résonnent pour l’usager comme un ensemble d’expériences de transport innovantes. Ici, le transport cesse d’être une fin en soi, puisqu’il est une évidence : ce qui devient premier, ce sont tous les services (confort, digital, qualité de la relation avec le personnel SNCF, etc…) que la SNCF sera en mesure de proposer à l’usager pour optimiser son expérience.

Quelles leçons en tirer pour sa propre entreprise ? Dans quels cas est-il intéressant d’opérer un changement de nom ?

Bien entendu, vous n’êtes ni SFR, ni la SNCF, et vous vous demandez légitimement en quoi un changement de nom pourrait apporter quelque-chose à votre entreprise.

Les leçons que vous pouvez tirer d’un changement de nom sont :

  • Ne changez pas de nom à la légère : un changement de nom ne doit intervenir que de manière exceptionnelle. Si votre nom doit être changé, c’est parce que vous démarrez une nouvelle étape majeure de votre histoire (croissance, digitalisation, nouveaux services, etc…)
  • Le changement de nom ne fait sens que dans le cadre de votre storytelling : et c’est la grande erreur commise par la SNCF que de ne pas avoir racontées correctement les raisons de ce changement de nom. N’oubliez jamais que votre branding n’a de sens que dans l’histoire que vous racontez à vos clients, sinon, il n’a aucun intérêt.
  • Ne faites pas table rase du passé en changeant de nom : le changement de nom ne vous permettra pas de vous racheter une respectabilité ! Comme dans toute histoire, ce sont les réussites et les échecs passés qui vous ont menés à cette nouvelle étape : ne faites donc pas l’impasse sur ce passé en espérant en la vertu javellisante de ce changement de nom. Elle n’existe pas, et c’est tant mieux ! Trouvez plutôt un bon storyteller qui saura raconter cette histoire, et valoriser même ses aspects les moins glorieux.

Dans quel cas, alors, est-il intéressant de changer de nom ? Parce que le nom par sa capacité à incarner, est porteur d’émotions fédératrices, le changement de nom ne peut intervenir que dans le contexte d’une mise en cohérence des différentes activités de l’entreprise, pour leur donner une logique narrative. Ainsi, lorsque vous avez créé votre entreprise, vous lui avez choisi un nom. Mais au fil des années, votre entreprise a changé : elle s’est complexifiée, apporte désormais de nouveaux services, ou de nouvelles compétences, bref, votre nom qui représentait au plus juste votre activité initiale n’est plus représentatif de ce que vous êtes actuellement.

C’est dans ce contexte que le changement de nom devient intéressant : parce qu’il va faire le lien entre toutes ces activités souvent disparates, pour les réunir sous une identité qui saura les représenter.

 

Comme vous le voyez, changer de nom n’est pas une fin en soi : un nouveau nom ne vous apportera rien si vous ne l’accompagnez pas d’un storytelling pertinent. Car une nouvelle identité suppose au préalable une nouvelle histoire à raconter, et c’est cette nouvelle histoire qu’il va vous falloir imaginer pour réussir la transformation de votre branding.

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